SOCIAL INFOS (LEX-PART) OCTOBRE 2015

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OCTOBRE 2015
LEX-PART INFOS

TEXTES
1- Loi Rebsamen : le calendrier des décrets d’application est précisé

Le calendrier de publication des décrets d’application de la loi dite « Rebsamen » a été publié le 1er octobre par le gouvernement. Les décrets concernant la réforme des IRP et celle du dialogue social devaient paraître entre octobre et décembre 2015.

L’enfer étant pavé de bonnes intentions…force est de constater, en cette fin de mois d’octobre, « un certain retard à l’allumage !!! Les décrets d’octobre ne sont pas encore parus …

• Réforme des IRP et de la négociation collective

Concernant la réforme des IRP, les premiers décrets étaient donc attendus et devaient fixer les délais suivants :

– celui de transmission des PV des délibérations du CE ;
– ceux de transmission de l’avis de chaque comité d’établissement au CCE ;
– celui dans lequel les avis du CHSCT sont rendus au CE ;
– celui dans lequel les avis des CHSCT sont transmis à l’ICCHSCT (instance de coordination des CHSCT).

Le même timing était prévu pour les décrets sur :

– le congé de formation économique, sociale et syndicale,
– les modalités de vote à bulletin secret en visioconférence,
– ainsi que les conditions de recours à l’enregistrement ou à la sténographie.

Nous devrons donc patienter encore un peu !!!

Les décrets relatifs à la « DUP nouvelle formule » (regroupant DP, CE et CHSCT dans les entreprises de moins de 300 salariés) et à l’instance conventionnelle regroupant les IRP (dans les entreprises de 300 salariés et plus) devraient paraître en novembre.

Doivent encore en effet être fixés notamment le nombre de représentants et celui du plafond du nombre d’heures nécessaire à l’exercice des attributions dévolues aux DP, CE et au CHSCT.
D’autres décrets doivent préciser en outre les conditions d’utilisation des heures de délégation, de désignation d’un secrétaire et de son adjoint et de recours à une expertise commune.

En décembre, devraient paraître les décrets listant les informations mises à disposition du CE en vue de la consultation annuelle sur la situation économique et financière de l’entreprise et celle sur la politique sociale.

Enfin, la fin de l’année serait également marquée par la publication des décrets concernant la négociation dans les entreprises dépourvues de DS (approbation par les salariés de l’accord, renouvellement,
révision ou dénonciation des accords) et celui sur les conditions dans lesquelles le seuil de 300 salariés est réputé franchi.

Pour l’heure la réforme reste donc en grande partie inapplicable !!!

• Pénibilité, burn out, surveillance médicale des salariés

Plusieurs décrets vont également venir préciser les mesures « santé au travail » de la loi Rebsamen relatives au compte pénibilité et au burn out.
Concernant le décret devant définir la surveillance médicale renforcée des salariés affectés à des postes à risques, soulignons que l’échéancier n’évoque qu’une « publication éventuelle » !!!
Ainsi, la loi Rebsamen a tout d’abord simplifié la mise en œuvre du compte pénibilité en remplaçant la fiche pénibilité par une déclaration des expositions. Le décret qui doit préciser les modalités de cette déclaration est attendu pour novembre.

En outre, la loi a facilité l’évaluation des expositions par l’employeur, celui-ci pouvant pour ce faire se baser sur des accords ou des référentiels professionnels de branche. Les conditions d’homologation de
ces référentiels seront fixées par un décret qui devait lui aussi être publié en octobre. Nous le guettons tous les jours…

Enfin, un autre décret à paraître en octobre devait acter l’annonce du gouvernement de reporter au 1er juillet 2016 l’application des six derniers facteurs de pénibilité et clarifier la définition et les seuils de plusieurs facteurs de pénibilité, dont le « travail répétitif ». Patience, donc…

Notons par ailleurs qu’afin de faciliter la reconnaissance du burn out comme maladie professionnelle, un décret prévu pour février 2016 devrait fixer les modalités spécifiques de traitement des dossiers portant sur cette pathologie.

• La prime d’activité

Quant à la prime d’activité, les deux décrets devraient être publiés en novembre 2015 !!!

2- Décret sur le nombre maximal de stagiaires par organisme d’accueil et par tuteur (Décret 2015-1359 du 26 octobre 2015, JO du 28)
La loi du 10 juillet 2014 sur l’encadrement des stages a posé le principe d’un nombre maximal de stagiaires par organisme d’accueil et par tuteur. Le décret d’application est sorti au Journal Officiel du 28 octobre 2015.

Les règles relatives au quota de stagiaires par organisme d’accueil et au nombre maximal de stagiaires par tuteur s’appliquent aux conventions de stages conclues postérieurement à la publication du décret au JO, soit à partir du 29 octobre 2015.

Le quota s’apprécie par semaine. Ainsi, le nombre maximum de stagiaires dont la convention de stage est en cours pendant une même semaine civile dans un organisme d’accueil doté de la personnalité morale est égal à :

– 15 % de l’effectif arrondis à l’entier supérieur pour les organismes d’accueil dont l’effectif est supérieur ou égal à 20.
– 3 stagiaires pour les organismes d’accueil dont l’effectif est inférieur à 20.

Les plafonds de 15 % et 3 stagiaires peuvent être relevés pour les périodes de formation en milieu professionnel obligatoires prévues dans le cadre des enseignements du second degré conduisant à un diplôme technologique ou professionnel.

L’autorité académique peut fixer par arrêté une limite pouvant aller jusqu’à 20 % de l’effectif lorsque celui-ci est supérieur ou égal à 30 ou 5 stagiaires lorsque l’effectif est inférieur à 30, en limitant le cas échéant cette dérogation à certains secteurs d’activité.

Pour vérifier le respect de ces limites, il convient de tenir compte de l’ensemble des personnes accueillies au titre des stages et des périodes de formation en milieu professionnel.

Par ailleurs, depuis la loi du 10 juillet 2014, l’organisme d’accueil doit désigner un tuteur chargé d’encadrer le stagiaire. Ainsi, le décret précise qu’un même tuteur ne peut suivre que 3 stagiaires maximum.
L’organisme d’accueil s’expose à une amende administrative en cas de violation des dispositions relatives à l’encadrement des stages (quota maximal de stagiaires par organisme d’accueil, obligation de désigner un tuteur, mais aussi quelques autres règles). Cette amende peut aller jusqu’à 2 000 € par stagiaire concerné par le manquement (4 000 € en cas de récidive).

JURISPRUDENCE

1- Comment reclasser un salarie déclaré inapte à tout emploi par le médecin du travail ? (Cass. soc., 24 juin 2015, n° 13-27875 ; Cass. soc., 24 juin 2015, n° 14-10163)
Lorsqu’un salarié est déclaré inapte à tout emploi dans l’entreprise par le médecin du travail, l’employeur ne doit pas en conclure que le reclassement est impossible, mais solliciter le médecin pour obtenir des précisions.

Depuis le 19 août 2015, date d’entrée en vigueur de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015, le médecin du travail déclarant un salarié inapte à son emploi à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle peut indiquer dans son avis d’inaptitude que le maintien du salarié dans l’entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé. Dans cette situation, l’employeur peut engager la procédure de
licenciement pour inaptitude sans être tenu de chercher un poste de reclassement.

En dehors de ce cas précis, la recherche d’un poste de reclassement s’impose à l’employeur.

Pour s’y conformer, ce dernier doit tenir compte des préconisations du médecin du travail.

Or, comment procéder si ce dernier déclare le salarié « inapte à tout emploi dans l’entreprise » (cas dans lequel la recherche de reclassement reste obligatoire) ou indique que « le maintien du salarié dans l’entreprise présente un danger pour sa santé » ? La Cour de cassation, dans ces deux espèces, indique la marche à suivre.

A réception d’un avis d’inaptitude portant de telles mentions, l’employeur ne doit en aucun cas en conclure de lui-même que le reclassement est impossible et engager immédiatement la procédure de licenciement.

Il doit impérativement solliciter le médecin du travail en vue d’obtenir des précisions :
– Si le médecin envisage des possibilités de reclassement, l’employeur doit orienter ses recherches en ce sens.
– Si le médecin exclut expressément toute possibilité de reclassement dans l’entreprise, l’employeur est alors considéré comme ayant satisfait à son obligation et peut engager la procédure de licenciement.

Dans la première affaire, le médecin avait répondu à l’employeur par un avis précis excluant tout reclassement au sein de l’entreprise en raison d’un danger pour la santé et la sécurité du salarié.
Dans la seconde, le médecin, interrogé par l’employeur sur les mesures envisageables pour reclasser le salarié, lui a répondu que l’état de santé de ce dernier était incompatible avec l’exercice d’une activité professionnelle quelconque au sein de l’entreprise.

En engageant la procédure de licenciement pour inaptitude sans effectuer de nouvelles recherches de reclassement, ces deux employeurs se sont conformés aux préconisations du médecin du travail.
Notre conseil : il faut absolument lire attentivement les avis rendus par le médecin du travail et ne pas hésiter à le solliciter afin d’obtenir ces précisions complémentaires renvoyant aux « formules » validées par la Cour de cassation !!!

2- L’employeur doit prendre l’initiative de former les salariés en contrat d’insertion (Cass. soc., 7 juillet 2015 n° 14-11919)

L’employeur qui ne prend pas l’initiative de former un salarié en CDD d’insertion manque à ses obligations et s’expose à la requalification de ce contrat en contrat à durée indéterminée.

La Cour de cassation juge de manière constante que l’obligation pour l’employeur d’assurer des actions de formation, d’orientation professionnelle et de validation des acquis au profit du salarié en contrat d’insertion constitue une des conditions d’existence d’un tel contrat.

Tout manquement à cette obligation expose l’employeur à des sanctions : dommages et intérêts si le salarié est titulaire d’un CDI ou requalification si le salarié est titulaire d’un CDD.

Il appartient à l’employeur de mettre en œuvre effectivement ces actions de formation. Il ne peut pas se contenter, comme dans la présente affaire, d’informer le salarié de l’existence de formations en lui remettant un catalogue et d’insister sur la nécessité de les suivre. Il ne peut pas être reproché au salarié de n’avoir effectué aucune démarche en ce sens.

Le même principe a été retenu par la Cour de cassation à propos de l’obligation générale de maintien de l’employabilité des salariés qui incombe à l’employeur (Cass. soc., 5 juin 2013, n° 11-21255 ; Cass. soc., 18 juin 2014, n° 13-14916).

Notre conseil : le recours aux contrats aidés, c’est bien; parfois indispensable. Il ne faut pas que cette démarche se transforme en coût social exorbitant, ce qui suppose une attention particulière à cet impératif de formation qu’il faut donc préparer et formaliser !!!

3- CSP : le salarié doit être informé de son droit à la priorité de réembauche avant l’adhésion (Cass. soc., 22 septembre 2015, n° 14-16218)

Dans un arrêt du 22 septembre, la Cour de cassation précise ainsi qu’en cas d’adhésion, le salarié bénéficie du droit à la priorité de réembauche applicable en cas de licenciement économique.

Ce droit doit avoir été porté à sa connaissance par écrit, en même temps que la notification du motif économique, donc avant l’acceptation du CSP. Il est ainsi précisé que l’employeur doit « énoncer le motif économique ainsi que la mention du bénéfice de la priorité de réembauche » :

– soit dans le document écrit d’information sur le dispositif du CSP, remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement. Rappelons que ce document doit être remis soit lors de l’entretien préalable au licenciement, soit à l’issue de la dernière réunion de consultation des représentants du personnel, soit, en cas de PSE, après la notification de la décision de validation ou d’homologation du DIRECCTE ;
– soit dans la lettre que l’employeur est tenu d’adresser au salarié lorsque le délai imparti à ce dernier pour répondre à la proposition de CSP expire après le délai d’envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du Code du travail ;
–soit encore, lorsqu’il n’est pas possible à l’employeur d’envoyer cette lettre avant l’acceptation par le salarié du CSP, dans tout autre document écrit, porté à sa connaissance au plus tard au moment de son acceptation.

Il y a quelques mois déjà, la Cour avait également appliqué au CSP la solution retenue à l’égard de la CRP, s’agissant d’une part, de l’obligation pour l’employeur d’informer le salarié sur le motif économique de la rupture et d’autre part, de la possibilité pour le salarié qui a adhéré au dispositif d’invoquer ensuite une irrégularité de la procédure de convocation à l’entretien préalable (Cass. soc., 17 mars 2015, n° 13-26941).

• Sanction du défaut d’information ou d’une information tardive

Lorsque le salarié n’a pas été informé, au plus tard lors de l’acceptation du CSP, sur le motif économique, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse. Il en va a fortiori de même lorsque le salarié n’a pas non plus été régulièrement informé de la priorité de réembauche.

En revanche, lorsque le défaut d’information (ou l’information tardive) concerne uniquement le droit à la priorité de réembauche, la cause réelle et sérieuse du licenciement n’est pas remise en cause.
Le salarié peut « seulement » prétendre à des dommages et intérêts en raison du préjudice subi.

Sur ce point, l’arrêt du 22 septembre précise ainsi que le minimum de deux mois de salaire prévu par la loi « en cas de non-respect de la priorité de réembauche » (article L. 1235-13 du Code du travail) ne s’applique qu’en cas de violation de cette priorité (par exemple, si l’employeur a procédé à un recrutement sans que le salarié ait pu faire valoir son droit).

Ce minimum ne s’applique pas, en revanche, à la simple absence d’information du salarié sur le droit à la priorité.

4- Interdiction de licencier après la période de protection pour un motif refusé par l’administration (Cass. soc., 23 septembre 2015, n° 14-10648)

Par un arrêt du 23 septembre, la Cour de cassation rappelle que le licenciement prononcé à l’expiration de la période légale de protection ne peut être motivé par des faits invoqués devant l’autorité administrative et qui ont déjà donné lieu à une décision de refus d’autorisation du licenciement.

Une fois la période de protection expirée, l’employeur peut licencier le salarié sans être tenu de demander l’autorisation de l’inspecteur du travail. La Cour de cassation veille toutefois à ce que
l’employeur ne puisse contourner le statut protecteur du salarié en laissant volontairement passer la période de protection.

Il a ainsi été jugé qu’un salarié ne peut être licencié après l’expiration de la période de protection pour des faits survenus durant celle-ci et qui auraient dû être soumis à l’inspecteur du travail (Cass. soc., 23 novembre 2004, n° 01-46234 ; Cass. soc., 5 mars 2015, n° 13-26667).

Dans le même sens, la Cour rappelle ici que les faits invoqués par l’employeur devant l’inspecteur du travail et qui ont donné lieu à un refus d’autorisation de licencier ne peuvent être invoqués comme motif de rupture après l’expiration de la période de protection.

Autrement dit, l’employeur ne peut espérer passer outre une décision de refus d’autorisation de licenciement en prononçant la rupture du contrat pour les mêmes faits une fois la période de protection expirée.
Un tel licenciement doit nécessairement être considéré sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 27 octobre 1998, n° 96-40880).

Notons que dans le cas particulier où l’autorisation de licenciement a été refusée par l’inspecteur du travail en raison de l’existence d’un lien avec le mandat détenu par le salarié, le licenciement prononcé à l’expiration de la période de protection pour des motifs identiques pourra être jugé nul car discriminatoire, ouvrant ainsi droit à réintégration du salarié (Cass. soc., 9 juillet 2014, n° 13-16434).
5- Sanction de substitution : le licenciement reste valable même sans second entretien (Cass. soc., 16 septembre 2015, n° 14-10325)

Si le salarié refuse une sanction disciplinaire entraînant la modification de son contrat de travail, l’employeur a la possibilité de prononcer une autre sanction, en remplacement de la première (Cass. soc., 16 juin 1998, n° 95-45033 ; Cass. soc., 7 juillet 2004, n° 02-44476 ; Cass. soc., 2 mars 2010, n° 08-44902).

L’employeur peut opter pour une sanction plus lourde que celle prévue initialement.

Mais, quelle que soit la nature de la sanction, il doit convoquer l’intéressé à un nouvel entretien dans les deux mois suivant le refus (Cass. soc., 28 avril 2011, n° 09-70619 ; Cass. soc., 15 janvier 2013, n° 11-28109).

Dans cette affaire, cette convocation n’avait pas eu lieu. En effet, suite au refus du salarié d’une mutation avec baisse de salaire en raison de son comportement fautif, l’employeur avait notifié directement son licenciement sans avoir procédé à un nouvel entretien préalable.

La Cour de cassation rappelle toutefois que le défaut d’entretien n’a pas pour effet de priver le licenciement de cause réelle et sérieuse, la nouvelle sanction étant toujours motivée par la faute à l’origine de la procédure disciplinaire. `

Ce faisant, elle maintient sa jurisprudence (Cass. soc., 11 septembre 2012, n° 11-20371; Cass. soc., 14 mai 2014, n° 13-11125).

Ce nouvel entretien ne doit cependant pas être négligé pour autant par l’employeur.

Outre une éventuelle condamnation pour irrégularité de procédure, cet entretien déclenche en effet un nouveau délai d’un mois pour le prononcé de la sanction et qui permet ainsi à l’employeur d’éviter d’être rattrapé par le délai de prescription (Cass. soc., 27 mars 2007, n° 06-42113).

6- Convention de rupture anticipée du CDD : interdiction d’exclure le paiement de l’indemnité précarité (Cass. soc., 6 octobre 2015, n° 14-19126)

La convention de rupture anticipée d’un CDD signée par l’employeur et le salarié ne peut pas contenir une clause excluant le paiement de l’indemnité de fin de contrat.

Un employeur et sa salariée engagée par un CDD ont, d’un commun accord, mis fin à la relation de travail de manière anticipée. La convention de rupture signée par la salariée précisait qu’elle ne percevrait aucune prime de précarité. Par la suite, la salariée a saisi les juges afin d’obtenir le paiement de cette indemnité.

Pour les premiers juges, la convention de rupture excluant le paiement de l’indemnité demandée, la salariée n’y avait pas droit.

La Cour de cassation n’a pas été de cet avis. Lorsqu’un CDD prend fin sans être suivi par un CDI, l’employeur doit en principe verser une indemnité de précarité égale à 10 % de la rémunération totale brute versée au salarié. Il existe, toutefois, des cas de figure, limitativement énumérés, dans lesquels cette indemnité n’est pas due. Mais aucun ne concerne la signature d’une convention de rupture anticipée entre l’employeur et le salarié.

La rupture d’un commun accord du CDD a pour seul objet de mettre fin aux relations des parties. Elle ne constitue donc pas une transaction dont l’objet est de mettre fin, par des concessions réciproques, à toute contestation née ou à naître résultant de la rupture définitive du contrat de travail.

Ainsi, la convention de rupture anticipée du CDD ne peut avoir pour effet de priver le salarié des droits nés de l’exécution de ce contrat, peu important les termes de l’accord.
En clair, l’employeur et le salarié ne peuvent pas signer une convention de rupture contenant une clause excluant le paiement de l’indemnité de fin de contrat. Cette clause ne serait pas valable en cas de litige devant les juges.

7- Requalification du CDD et paiement des périodes interstitielles (Cass. soc., 16 septembre 2015, n° 14-16277)

En cas de requalification de plusieurs CDD non successifs en une relation à durée indéterminée, le salarié ne peut obtenir un rappel de salaires pour les périodes d’attente entre deux contrats, que s’il s’est tenu à la disposition de l’employeur durant cet intervalle.

Dans un arrêt du 16 septembre, la Cour de cassation clarifie les règles de preuve en la matière, en précisant qu’il n’y a pas de présomption, la charge de la preuve reposant sur le salarié.
Le recours répété à des CDD conclus avec le même salarié ne doit pas contrecarrer l’interdiction de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise ou, de manière générale, les dispositions d’ordre public relatives au CDD.

Une telle situation justifie en effet la requalification de l’ensemble de la relation en un CDI.

En plus de l’indemnité de requalification et des indemnités correspondant à un licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié peut alors réclamer le paiement des périodes d’attente entre deux CDD, dénommées périodes interstitielles ou d’inter contrats.

Encore faut-il qu’il parvienne à établir que, durant cet intervalle, il s’est tenu à la disposition de l’employeur.

L’arrêt du 16 septembre 2015 pose clairement ce principe et ne fait que confirmer une solution plusieurs fois réaffirmée (Cass. soc., 28 septembre 2011, n° 09-43385 : une cour d’appel n’a pas inversé la charge de la preuve en jugeant que le salarié n’établissait pas s’être tenu à la disposition de l’employeur en vue d’effectuer un travail ; Cass. soc., 10 décembre 2014, n° 13-22422 : il appartenait au salarié d’établir qu’il s’était tenu à la disposition de l’employeur pendant les périodes d’intercontrats).

8- Rupture conventionnelle : nouvelles précisions de la Cour de cassation (Cass. soc., 16 septembre 2015, n° 14-13830 et 14-10291)

La jurisprudence sur la rupture conventionnelle s’étoffe de deux nouveaux arrêts rendus le 16 septembre 2015. L’un prend position sur le contrôle opéré par la Cour de cassation s’agissant de l’existence d’un vice du consentement. L’autre se prononce sur les effets d’une tentative de conclusion d’une rupture conventionnelle postérieurement à une démission.

Au fil de ses décisions, la Cour de cassation a fait de la reconnaissance d’un vice du consentement l’un des moyens de remise en cause d’une rupture conventionnelle. Au salarié de prouver qu’il a fait l’objet de pressions ou menaces l’ayant contraint à la signature. Le contentieux sur ce terrain restera centré sur les juridictions du fond (conseils de prud’hommes et cours d’appel). Dans un récent arrêt, la Cour abandonne en effet à l’appréciation des juges du fond la question de l’existence d’un vice du consentement, fermant ainsi la possibilité de débattre à nouveau de ce point lors d’un pourvoi.
Dans un second arrêt du même jour, la Cour de cassation envisage l’hypothèse d’une tentative de conclusion d’une rupture conventionnelle postérieurement à une démission.

Une salariée avait donné sa démission à effet du 30 novembre 2010. Le 9 décembre suivant, sur proposition de la salariée, l’employeur l’avait convoquée à un entretien en vue d’une rupture conventionnelle. La procédure n’est pas allée plus loin puisque la salariée ne s’est pas présentée au rendez-vous et aucune convention n’a donc été signée.

Pour autant, la salariée a ultérieurement fait valoir que cette convocation en vue de la signature d’une rupture conventionnelle valait renonciation commune des parties à la démission, de sorte que le contrat de travail n’avait jamais été rompu et pouvait faire l’objet d’une action en résiliation judiciaire aux torts de l’employeur.

Restait à savoir si les parties étaient effectivement revenues sur la démission. La rétractation d’une démission ne peut en effet produire effet qu’à la condition d’avoir été acceptée par l’employeur.

Or, faut-il considérer que la simple convocation à un entretien en vue d’une rupture conventionnelle vaut acceptation par l’employeur de la rétractation de la démission du salarié ?

A cette question, la Cour de cassation répond par la négative : dès lors que la salariée ne s’est pas présentée à l’entretien et que la rupture conventionnelle n’a pas été signée, il n’y a pas de renonciation à la démission. Aucune action en résiliation judiciaire ne pouvait donc être introduite.

Dans l’hypothèse d’une signature de la convention de rupture, une question reste toutefois en suspens : si l’une des parties exerce ensuite son droit de rétractation afférent à la rupture conventionnelle, la signature de celle-ci pourra-t-elle continuer à être considérée comme valant renonciation à la démission ?

A suivre…

9- Rupture conventionnelle : prise d’acte admise sous réserve (Cass. soc., 6 octobre 2015, n° 14-17539)

Dans un arrêt du 6 octobre, la Cour de cassation se prononce pour la première fois sur la possibilité de recourir à une prise d’acte avant la date d’effet d’une rupture conventionnelle qui ne peut plus être rétractée. Il est ainsi précisé qu’entre la date d’expiration du délai de rétractation et la date d’effet de la rupture conventionnelle, une prise d’acte est possible pour des manquements survenus ou découverts au cours de cette période.

La Cour admet donc qu’une prise d’acte reste envisageable durant la phase d’instruction de la demande d’homologation, voire entre la date d’homologation et la date d’effet de la rupture, mais avec une réserve.
En effet, une telle prise d’acte n’est possible qu’à la condition d’être fondée sur des manquements survenus ou découverts par le salarié au cours de cette période.

Une action fondée sur des manquements antérieurs à la date d’expiration du délai de rétractation devra donc être écartée par le juge au profit de la rupture conventionnelle.

10- Un test salivaire de dépistage de drogue ne peut être pratiqué par l’employeur (CAA Marseille, 7e ch., 21 août 2015, n° 14MA02413)

Portent une atteinte disproportionnée aux droits et libertés des salariés les dispositions d’un règlement intérieur autorisant un supérieur hiérarchique à procéder à des tests salivaires dont les résultats positifs peuvent aboutir à des sanctions disciplinaires.

En raison de leur obligation de sécurité de résultat, certains employeurs peuvent être tentés d’insérer dans le règlement intérieur une clause leur permettant de recourir à des tests salivaires.
Mais encore faut-il que ce dispositif soit justifié par la nature de la tâche à accomplir et proportionné au but recherché.

Tel n’est pas le cas, précise la cour administrative d’appel de Marseille, lorsque le règlement intérieur prévoit que les tests peuvent être pratiqués directement par le supérieur hiérarchique et donner lieu à sanction disciplinaire.

La cour administrative d’appel pose tout d’abord pour principe que « les modalités d’un tel contrôle ne peuvent apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ».

Or, en l’espèce, elle juge que « le recours à des tests salivaires de dépistage de consommation de produits stupéfiants tels qu’il était mis en place par le projet de règlement intérieur […], c’est-à-dire en faisant pratiquer ces tests par un supérieur hiérarchique et en prévoyant la possibilité d’une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement dans l’hypothèse d’un résultat positif, porte, eu égard à l’absence de respect du secret médical et, au surplus, de fiabilité suffisante, en l’état des tests salivaires existants à ce jour, d’un résultat positif, une atteinte disproportionnée aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives par rapport au but recherché ».

En pratique, un règlement intérieur peut donc prévoir, lorsque les fonctions exercées le justifient, un dispositif de dépistage de drogue par le biais de tests salivaires, dès lors que :

– ces tests sont effectués par un médecin. Les juges du fond estiment en effet que les tests salivaires consistent en « un prélèvement d’échantillons biologiques contenant des données biologiques et cliniques soumises au secret médical, ce qui exclut qu’ils puissent être pratiqués et leurs résultats interprétés par un supérieur hiérarchique ». En clair, si un alcootest peut être effectué par l’employeur, un test salivaire doit au contraire être pratiqué par un médecin.
– ces tests ne peuvent fonder une sanction disciplinaire en cas de résultat positif. Dès lors que seul le médecin peut connaître et interpréter les résultats d’un test salivaire, admettre que l’employeur puisse prononcer une sanction sur ce fondement porte nécessairement atteinte au secret médical. Autre argument développé par les juges : l’absence de fiabilité d’un tel dispositif de dépistage.
Reste que si un salarié ne peut être sanctionné sur la base d’un test salivaire, il peut en revanche faire l’objet d’une mesure disciplinaire s’il a été surpris en train de consommer de la drogue sur le lieu de travail ou si son comportement se traduit par une inexécution des obligations prévues par son contrat de travail.

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